On entend ça à la pelle. À la télévision, à la radio, sur le web, dans les écoles, à la commission scolaire, dans nos familles.
« Les enfants différents »
Une tautologie qui me fait grincer des dents.
On veut désigner ceux qui ne suivent pas le tronc commun, ceux qui ont besoin de soutien supplémentaire dans leurs apprentissages, ceux qui sont handicapés d'une manière ou d'une autre. Mais.... tous les humains sont différents! Oui, ils sont différents, comme vous et moi le sommes. Il n'y a pas deux être humains sur terre qui sont pareils, mêmes les jumeaux sont différents malgré leurs similarités.
Alors pourquoi parler des « enfants différents » ? Pour les mettre dans une petite case, une petite boîte qui nous permet de les séparer des « autres » qui sont ...
...je vous entends le dire dans votre tête.
« Normaux ». Les ceuzes qui suivent la norme. Ceux qui ne sont pas « défectueux », sous-entend-t-on.
Mon fils a certes besoin d'accompagnement, de méthodes d'enseignement et d'un encadrement adaptés. Il a des besoins que d'autres enfants n'ont pas. Des besoins qui ne ressemblent même pas à ceux de sa petite camarade de classe qui elle-aussi est TSA.
Et c'est dans le respect de son caractère unique qu'il sera en mesure de créer des ponts avec tous les autres qui font partie de son écosystème. C'est à partir de cette prise de conscience qu'il pourra célébrer qui il est et trouver la place qui lui revient dans la société, non pas en tant qu'être « différent » mais en tant qu'un être unique.
Mais chaque enfant est d'abord un enfant. Mon fils est un enfant. Demain, il sera ado et après-demain, il sera adulte. Si on continue de le désigner comme un individu « différent » - avec la petite étiquette qui dépasse de son chandail - on va le stigmatiser. Il sera celui qui ne « fitte » pas nul part.
« Ben non! » s'exclament en coeur les biens-pensants. Mais non, c'est pas dans ce sens-là qu'on dit ça, ce n'est pas péjoratif! C'est beau la différence, il faut célébrer la différence! »
Ok, au sens général, oui, c'est beau la différence, mais nous utilisons le mauvais mot. Nous devons célébrer l'unicité de chaque individu.
Mon fils est unique, comme le vôtre. Il a besoin qu'on adapte un peu son environnement, il a besoin d'aide, d'un encadrement particulier, mais je n'ai pas envie qu'il passe le reste de sa vie à s'interroger sur un concept qui ne tient pas la route et qui lui renvoie le message qu'il fonctionne en marge de la société. Les mots que nous utilisons peuvent changer le cours d'une vie.
Je veux que mon fils soit fier de ce qu'il est, avec ses forces et ses faiblesses, avec ses défis, avec sa réalité qui lui sera unique. Unique, comme votre réalité l'est aussi. Et c'est dans le respect de son caractère unique qu'il sera en mesure de créer des ponts avec tous les autres qui font partie de son écosystème. C'est à partir de cette prise de conscience qu'il pourra célébrer qui il est et trouver la place qui lui revient dans la société, non pas en tant qu'être « différent » mais en tant qu'un être unique.
L'unicité est en fait notre seul grand dénominateur commun. C'est ce qui permet de créer, de bâtir, d'imaginer. Reconnaître que nous sommes uniques permet aussi d'apprendre à s'aimer tel quel, à croire que, chacun à notre manière, nous pouvons contribuer à la société.
Alors, lâchez-moi ça, « les enfants différents ». C'est la pire invention du siècle!